Voici deux fusains totalement inédits dus à Charles Faure-Vincent plus connu sous son pseudonyme de Vincent Flo et souvent appelé Charlot par les amis. Il nous est agréable de les faire connaître sur cette page afin de perpétuer la mémoire de cet artiste fuvelain, comédien et auteur hors-pair dont la plus grande partie des oeuvres sont malheureusement égarées.

Hippolyte et Compagnie – Réséda – Le gang des trottinettes noires – Coup de Mistral – Rock and roll – Oh! Bonne mère – Comme la lune – Les bijoux de l’Abbé Gomme – Les cornes de Clocheville – Les trois mousses à terre – Feu fu-tu.

Par chance nous avons pu retrouver et copier un poème, écrit sur un brouillon, il l’avait déclamé au cours d’un repas amical et avait fait l’admiration de tous les convives.

Pour la compréhension de la fin du texte, il faut préciser que sa fille aînée est mariée au fils du premier adjoint de la mandature Philip : Lazare Richier.

Requête à la municipalité par Vincent Flo

Nous sommes en 1960
Depuis déjà pas mal de mois
Le mécontentement augmente
Et vous allez savoir pourquoi.
Car on le dit comme on le pense,
Ça gaze plus, vraiment c’est trop,
Pour mettre un terme à nos souffrances,
Faut un château d’eau à Fuveau.
Comment voulez-vous qu’on se lave,
Les vieux quartiers sont privés d’eau,
Elle arrive pas à la cave,
Alors plus haut, macache bono.
Ah, je sais, vous allez me dire
« Dans le temps, on s’en contentait »
Mais les temps ont changé, Messire
Maintenant, on veut se laver !
Dans le temps de la Déveulière,
On venait à pieds… ma chère
Pour chasser la noire poussière,
Dans la cuisine on se lavait.
On posait sur un seau, peuchère,
Un tian bien souvent ébréché.
Lou « peiróu » à la crémaillère
Était plein d’eau chaude fumée.
Croyez-vous que c’était pratique ?
C’est pourquoi ce soir, tout de go,
Je vous adresse ma supplique,
Faut un château d’eau à Fuveau .

Oh, je sais très bien que naguère,
Les gens ne se lavaient pas trop
Oui mais depuis, y a eu les guerres
Et le progrès plus qu’il n’en faut.
Je me souviens que ma grand-mère
Une fois par an s’en allait,
Á Aix aux bains de la Monnaie,
Car il faut que je le raconte,
Car c’est trop drôle, jugez-en,
Ça vaut bien son pesant de fonte
Ou d’or éventuellement…
On était trois. La sœur Julie,
Elle, bien sûr, cela s’entend
Et pour compléter la série,
Moi, qui n’avais pas bien sept ans.
Elles rentraient dans la baignoire
En chemise de toile écrue,
Car devant moi, c’est bien notoire,
Elles voulaient pas montrer leur nu.
Il me semble de voir encore,
Ces chemises qui se gonflaient,
Restant sur l’eau, gonflant encore,
La baignoire en débordait
En souvenir de ces chemises,
Pour ne plus voir un tel tableau,
Permettez que je vous le dise,
Faut un château d’eau à Fuveau
.
C’était péché pour nos grands-mères
De se laver disons, à fond,
Fallait pas laver son derrière,
Juste le nez, pas le croupion.
Aussi, fallait voir la marmaille
Qui circulait parmi les rues
Mais puis vint l’eau… Par représailles,
La natalité en décrut.
Les familles les mieux pensantes,
Se contentaient d’un seul niston
Pour nous freiner sur cette pente,
Il fallait les allocations.
Aussi, maintenant ça déborde,
Des gosses, il y en a de trop
Et pour en arrêter la horde
Faut un château d’eau à Fuveau.

Et que dire ? de mon beau frère
Qui fait faire une salle d’eau 
Et ne peut laver son derrière,
L’eau ne montant pas assez haut.
Il est très grand sur ses deux pattes
Mais c’est pas sa faute pourtant…
Et même s’il était cul-de-jatte,
Il pourrait pas se laver les dents.
Aussi, Messieurs, je vous en prie,
Pour que mon beau-frère ait de l’eau
Et se lave en entier, je vous dis,
Faut un château d’eau à Fuveau.

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